I. Classification des troubles fonctionnels

1. DOULEURS AIGUES/ SUBAIGUES DE L’ÉPAULE

a. Douleurs nociceptives de la face postérieure

  • Douleur musculaire (trapèze, angulaire, rhomboïde, dentelé antérieur) d’origine locale (surmenage) et/ou cervicale.
  • Douleur référée cervicale (UFR C4C5 -C5C6 – C6C7)
  • Dorsalgie supérieure
  • Douleur costo-vertébrale de voisinage

 b. Douleur neurogène rapportée à la face postérieure

  • Syndrome radiculaire cervical (NCB)
  • Douleur projetée vers l’omoplate et le membre supérieur
  • EVA >5 le plus souvent

c. Douleurs nociceptives de la face antéro-externe

  • Bursite et/ou tendinopathie de la coiffe des rotateurs (sus-épineux ++)
    • EM réflexe diffusé aux stabilisateurs et aux mobilisateurs de la GH.
    • EM réflexe associé des muscles stabilisateurs et mobilisateurs de la ceinture scapulaire.
    • Réaction liquidienne probable
    • Ressenti intense à extrême / EVA>5
  • Tendinopathie du chef long du biceps brachial
    • EM du muscle biceps brachial
    • ATCD de tendinopathie de la coiffe
  • Douleurs des muscles de la coiffe et/ou du deltoïde d’origine locale (surmenage, traumatisme direct)
    • Ressenti léger à modéré / EVA <5
    • Pas de réaction liquidienne
  • Douleurs référées cervicales (UFR C4C5 ; C5C6)
    • Trouble fonctionnel cervical associé avec EM des couches stabilisatrices au niveau du RCM
    • EM des muscles de la coiffe et/ou du deltoïde et/ou du biceps brachial
    • Douleur à la palpation du « V » deltoïdien
    • Dermocellulalgie au moignon de l’épaule, à la face externe du bras, voire de l’avant-bras.
  • Douleur acromio-claviculaire post-traumatique
    • ATCD chute sur l’épaule
    • Absence de laxité des ligaments acromio-claviculaires (axe vertical ou sagittal) ou de fracture claviculaire
    • EM du trapèze
    • Tuméfaction locale

d. Douleurs neurogènes rapportées à l’épaule

  • Syndrome radiculaire C5 homolatéral
    • EVA > 5 le plus souvent
    • Absence de déficit moteur ou testing supérieur à 3
    • Hypoesthésie légère du moignon de l’épaule
  • Syndrome de la traversée cervico-thoraco-brachiale (cf. rachis thoracique)
  • Syndrome canalaire du nerf axillaire dans le trou carré de Velpeau
    • Douleur prédominant à la face antérieure de l’épaule pouvant irradier vers le bord externe du bras
    • Majorée en antépulsion et/ou lors d’un mouvement de lancer d’un objet.
    • Déficit moteur du deltoïde et déficit sensitif du moignon de l’épaule
  • Syndrome canalaire du nerf musculo-cutané lors de sa traversée du muscle coraco-brachial
    • Brulures du creux axillaire jusqu’au poignet
    • Troubles sensitifs au bord externe de l’avant-bras
    • Déficit moteur en flexion du coude et supination (TM>3)
    • Diminution du réflexe bicipital

2. DOULEURS CHRONIQUES/RECURRENTES DU MEMBRE SUPÉRIEUR

  • Douleurs d’origine nociceptive ou neurogène, décrites ci-dessus, qui perdurent plus de 3 mois.
  • Douleurs chroniques fréquentes au niveau du membre supérieur.
  • Intensité légère à modérée / EVA < 5
  • Centralisation progressive de la douleur (à rechercher à l’examen clinique)
  • Intégration progressive de l’enraidissement des couches musculaires stabilisatrices et mobilisatrices
  • Troubles proprioceptifs qui favorisent l’entretien des lésions tendineuses
  • Dégénérescence tissulaire progressive objectivable aux examens complémentaires
    • Apparition de nodules calciques et/ou de lésions transfixiantes dans les tendons, notamment de la coiffe des rotateurs.
    • Apparition tardive d’arthrose avec limitation progressive des amplitudes articulaires
    • Omarthrose
    • Arthrose huméro-radiale et/ou huméro-ulnaire
    • Rhisarthrose trapézo-métacarpienne ++
    • Arthrose scapho-trapézienne
    • Arthrose scapho-radiale (SLAC Wrist)

II. Recommandations de bonne pratique

1. RECOMMANDATIONS POUR L’EXAMEN CLINIQUE

a. La mise en évidence de la structure douloureuse est souvent possible au niveau du membre supérieur.

b. Elle nécessite de mettre sous contraintes les sources supposées de douleur :

  • Douleur articulaire :
    • Palpation d’une interligne déformée par l’arthrose
    • Limitation d’amplitude articulaire
    • Tests spécifiques de compression de l’interligne de l’épaule :
    • Manœuvre de Neer
    • Signe de Yocum
    • Manœuvre de Hawkins
    • Hydarthrose visible au coude et au poignet
  • Douleur ligamentaire :
    • Pression sur les insertions et/ou corps
    • Mise en tension par mobilisation brusque en « ouverture » de l’interligne.
    • Tests de laxité en cas de traumatisme
  • Douleur musculaire :
    • Palpation d’un enraidissement du muscle (dureté + douleur)
    • Cartographie des « points gâchettes »
    • Contraction isométrique contrariée
  • Tendinopathie :
    • Contraction excentrique.
    • Contraction isométrique contrariée
  • Syndrome canalaire (douleur neurogène) :
    • DNA 4 + ROT + testing musculaire
    • Compression possible du nerf sur son trajet ou au lieu de piégeage
    • Manœuvres spécifiques d’étirement du nerf
    • Attention à la possibilité d’un Double Crush Syndrom

c. Il est nécessaire de tenir compte des qualités métrologiques (fiabilité) des tests utilisés

  • Un test très sensible est bon pour exclure une pathologie (SeNex)
  • Un test très spécifique est bon pour inclure une pathologie (SpéPin)

d. Les douleurs chroniques peuvent faire l’objet d’une recherche de centralisation de la douleur.

  • Sensibilisation neurocentrale
    • Mise en évidence d’allodynie et hyperalgésie métamériques ou diffuses
    • Questionnaire de sensibilisation
  • Mémorisation corticale
    • Examen clinique pauvre
    • Douleur inconstante à caractère contextuel
    • Trouble du comportement face à la douleur.

2. RECOMMANDATIONS PAR SYNDROME

a. Syndromes traumatiques

  • Examen visuel
    • Attitude caractéristique du traumatisé du membre supérieur.
    • Impotence fonctionnelle majeure avec limitation des amplitudes articulaires.
    • Déformation osseuse, atteinte tégumentaire
  • Tests de laxité ligamentaire
    • Articulation acromio-claviculaire
  • Tiroir antéro-postérieur
  • Signe de la « touche de piano »
    • Articulation gléno-humérale
  • Test du tiroir
  • Sulcus test
  • Tests d’appréhension
    • Articulation huméro-ulnaire
  • Milking test
  • Test de O’Driscoll
    • Articulations du poignet
  • Tiroir antéro-postérieur radio-carpien
  • Subluxation de la tête ulnaire en prono-supination active
  • Test du tiroir antéro-postérieur radio-ulnaire
  • Test de Watson (scapho-lunaire)
  • Test de Reagan et Linscheid (lunato-triquétrale)
  • Test capito-lunate
  • Test triquetro-hamate
  • Examens complémentaires
    • Radiographies
    • IRM de l’articulation

b. Syndromes inflammatoires

  • Tests cliniques à la recherche d’une inflammation localisée d’un tissu (ténosynovite, bursite, hygroma, …)
    • Tests de mise en évidence d’un conflit sous-acromial
    • Manœuvre de Finkelstein (associée à une extension et abduction contre résistance pour DE Quervain)
    • Crépitations douloureuses à la palpation ou au coulissement des tendons mis sous tension
    • Tuméfaction visible
  • Examens complémentaires :
    • Numération formule sanguine, vitesse de sédimentation, CRP
    • IRM de l’épaule
    • Échographie (coude, poignet)
    • Échographie abdominale
    • ECG, échographie cardiaque
    • EEG, scanner cérébral     

c. Syndromes infectieux

  • Numération formule sanguine, vitesse de sédimentation, CRP
  • Ponction de liquide articulaire pour examen de la composition
  • Radiographies

d. Syndromes dégénératifs

  • Examen visuel et palpatoire de l’interligne articulaire
  • Radiographies

e. Syndromes métaboliques

  • Radiographies à la recherche d’une ostéonécrose
  • IRM (ou scintigraphie) en cas de suspicion d’algodystrophie

f. Syndromes tumoraux

  • Vitesse de sédimentation
  • Électrophorèse des protéines sanguines

g. Syndromes dysmorphiques

  • Déformations visibles à l’examen clinique
  • Radiographies

h. Syndromes neurologiques

  • Examen clinique
    • Syndrome du nerf supra-scapulaire
      • Pression digitale en regard de l’échancrure coracoïdienne
      • Mise en tension du nerf par adduction du bras (coude vers épaule opposée)
      • Testing musculaire (TM) en abduction et rotation latérale de l’épaule
    • Syndrome du nerf axillaire
      • TM en abduction d’épaule (type drop arm test)
      • Pique-touche au moignon de l’épaule
      • Pression digitale sous ou à proximité du bord postérieur du faisceau postérieur du deltoïde (espace axillaire latéral)
    • Syndrome du nerf thoracique long
      • Manœuvre des « pompes sur le mur »
    • Syndrome du nerf musculo-cutané
      • ROT bicipital
      • TM en flexion du coude et supination
      • Pic-touche face antéro-externe du bras
      • Pression digitale dans le coraco-brachial
      • Compression du nerf cutané latéral de l’avant-bras dans le sillon bicipital latéral ou contre la face antéro-latérale du radius, au 1/3 distal de l’avant-bras.
    • Syndrome du nerf radial au niveau de la gouttière humérale
      • ROT tricipital et force triceps préservés
      • Faiblesse de l’extension du poignet et des doigts
      • Faiblesse de l’extension et abduction du pouce.
      • Main tombante en col de Cygne si atteinte motrice importante
    • Syndrome du nerf radial au niveau du creux axillaire
      • Idem + faiblesse triceps et atteinte du ROT tricipital

III. Conseils et orientations thérapeutiques possibles

1. DOULEURS

a. Douleur nociceptive locale

  • Médecin
    • Antalgiques dont le pallier dépend de l’intensité
    • Éventuellement AINS per-os (sauf pour tendinopathie)
    • Crème anti-inflammatoire
    • Infiltration locale de corticoïdes (ex : ténosynovite)
    • Immobilisation de l’épaule ou du coude par une écharpe ou une orthèse
    • Immobilisation du poignet par orthèse rigide.
    • Mésothérapie
    • Bloc anesthésique
    • Chirurgie en dernier recours
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie antalgique : électrothérapie, ondes électromagnétiques, ultrasons, thermothérapie.
    • Massage transverse profond et étirements pour les tendinopathies
    • Strapping épaule, coude ou poignet
    • Rééducation gestuelle
  • Autonomie:
    • Repos sportif, limitation du geste délétère
    • Glaçage
    • Auto-massage et étirement

b. Douleur neurogène sur syndrome canalaire

  • Médecin
    • Antalgiques pallier 2/3 et AINS/corticoïdes
    • Dispositif TENS
    • Orthèse sur syndrome du canal carpien
    • Infiltration de corticoïdes
    • Chirurgie canalaire libératrice (canal carpien, loge de Guyon, gouttière épitrochléo-olécrânienne)
    • Neuro-modulation électrique ou chimique
    • Hypnothérapie ericksonienne

c. Douleurs chroniques

  • Médecin
    • Antalgiques
    • En cas de sensibilisation neurocentrale :
    • Antiépileptique, anesthésiques
    • Antidépresseurs, analgésiques
    • En cas de douleurs mémorisées
    • Antidépresseurs, anxiolytiques
    • Éducation thérapeutique
  • Médecin du travail
    • Aménagement de l’environnement professionnel (ergonomie du poste, changement de poste, …)
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie antalgique
    • Rééducation gestuelle
  • Psychothérapeute, sophrologue
    • Hypnothérapie (ericksonienne de préférence)
    • Thérapies psycho-corporelles (yoga, sophrologie, méditation, …)

2. ENRAIDISSEMENT MUSCULAIRE    

a. Réflexe

  • Médecin
    • Myorelaxants
    • Anxiolytiques à dose rhumatologique
    • Toxine botulique type A
    • Mésothérapie
    • Crème décontracturante
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie décontracturante
    • Massothérapie
    • Strapping

b. Intégré

  • Médecin
    • Myorelaxants
    • Anxiolytiques à dose rhumatologique
    • Toxine botulique type A
    •  Mésothérapie
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie décontracturante

3. REACTION LIQUIDIENNE

  • Médecin
    • AINS ou corticoïdes
    • Infiltration de corticoïdes
    • Ponction articulaire
  • Kinésithérapeute
    •  Drainage
  • Autonomie
    • Protocole RICE ou GREC