I. Classification des troubles fonctionnels

1. DOULEURS AIGUES/SUBAIGUES DU COUDE

a. Douleurs nociceptives de l’épicondyle latéral

  • Douleur aponévrotique
    • Usure de la partie profonde de l’aponévrose du court extenseur radial du carpe+++ (CERC) et/ou de l’extenseur commun des doigts
    • Douleur postéro-externe du coude
    • Ressenti intense à extrême / EVA > 5
    • Impotence fonctionnelle douloureuse ++
    • EM des muscles cités
    • Pas de réaction liquidienne
  • Douleurs projetées référées cervicales (UFR C5C6 ; C6C7)
    • Trouble fonctionnel cervical associé avec EM de la couche profonde au niveau du RCI.
    • EM des épicondyliens et/ou long extenseur radial du carpe et/ou brachio-radial
    • Douleurs à la palpation des insertions musculaires épicondyliennes, olécrâniennes ou au pli du coude.
    • Dermocellulalgie à la face externe et/ou postéro-externe du bras et/ou de l’avant -bras.
    • Douleurs musculaires par surmenage des épicondyliens et/ou long extenseur radial du carpe et/ou brachio-radial
    • Gestuelle professionnelle ou sportive favorisante associant serrages manuels d’outils, flexion du coude, pronation et/ou frappe répétée d’objets.

b. Douleur neurogène responsable d’une épicondylite

  • Syndrome canalaire du nerf radial (profond) lors de son passage entre les 2 chefs du muscle supinateur
    • Douleur à la face antéro-latérale du coude et de l’avant-bras
    • Palpation douloureuse en regard de l’insertion du CERC et/ou du muscle supinateur (Arcade de Fröhse)
    • Troubles sensitifs légers à la face dorsale du pouce et de la main sur la zone de peau entre le pouce et l’index.
    • Faiblesse des muscles extenseurs des doigts (testing musculaire > 3)

c. Douleurs nociceptives de l’épicondyle médial (ou épitrochlée)

  • Douleur aponévrotique sur l’insertion commune des muscles fléchisseurs du carpe et des doigts.
    • Concerne les muscles : fléchisseur superficiel des doigts, fléchisseur radial du carpe, long palmaire, fléchisseur ulnaire du carpe.
    • Douleur antéro-interne du coude fréquente dans les sports de lancer.
    • EM d’un ou plusieurs muscles cités
  • Douleur ligamentaire par traumatisme du ligament latéral interne (entorse)
  • Douleurs référées cervicales (UFR C7T1 ; T1T2)
    • Trouble fonctionnel cervical avec EM des muscles stabilisateurs de la charnière cervico-thoracique
    • EM des épitrochléens
    • Dl à la palpation de l’épitrochlée et/ou des insertions distales.
    • Dermocellulalgie à la face interne de l’avant-bras.
  • Douleurs musculaires des épitrochléens et/ou du rond pronateur
    • Surmenage musculaire rencontré fréquemment dans les sports de lancer

2. DOULEURS CHRONIQUES/RECURRENTES DU MEMBRE SUPÉRIEUR

  • Douleurs d’origine nociceptive ou neurogène, décrites ci-dessus, qui perdurent plus de 3 mois.
  • Douleurs chroniques fréquentes au niveau du membre supérieur.
  • Intensité légère à modérée / EVA < 5
  • Centralisation progressive de la douleur (à rechercher à l’examen clinique)
  • Intégration progressive de l’enraidissement des couches musculaires stabilisatrices et mobilisatrices
  • Troubles proprioceptifs qui favorisent l’entretien des lésions tendineuses
  • Dégénérescence tissulaire progressive objectivable aux examens complémentaires
    • Apparition de nodules calciques et/ou de lésions transfixiantes dans les tendons, notamment de la coiffe des rotateurs.
    • Apparition tardive d’arthrose avec limitation progressive des amplitudes articulaires
    • Omarthrose
    • Arthrose huméro-radiale et/ou huméro-ulnaire
    • Rhisarthrose trapézo-métacarpienne ++
    • Arthrose scapho-trapézienne
    • Arthrose scapho-radiale (SLAC Wrist)

II. Recommandations de bonne pratique

1. RECOMMANDATIONS POUR L’EXAMEN CLINIQUE

a. La mise en évidence de la structure douloureuse est souvent possible au niveau du membre supérieur.

b. Elle nécessite de mettre sous contraintes les sources supposées de douleur :

  • Douleur articulaire :
    • Palpation d’une interligne déformée par l’arthrose
    • Limitation d’amplitude articulaire
    • Tests spécifiques de compression de l’interligne de l’épaule :
    • Manœuvre de Neer
    • Signe de Yocum
    • Manœuvre de Hawkins
    • Hydarthrose visible au coude et au poignet
  • Douleur ligamentaire :
    • Pression sur les insertions et/ou corps
    • Mise en tension par mobilisation brusque en « ouverture » de l’interligne.
    • Tests de laxité en cas de traumatisme
  • Douleur musculaire :
    • Palpation d’un enraidissement du muscle (dureté + douleur)
    • Cartographie des « points gâchettes »
    • Contraction isométrique contrariée
  • Tendinopathie :
    • Contraction excentrique.
    • Contraction isométrique contrariée
  • Syndrome canalaire (douleur neurogène) :
    • DNA 4 + ROT + testing musculaire
    • Compression possible du nerf sur son trajet ou au lieu de piégeage
    • Manœuvres spécifiques d’étirement du nerf
    • Attention à la possibilité d’un Double Crush Syndrom

c. Il est nécessaire de tenir compte des qualités métrologiques (fiabilité) des tests utilisés

  • Un test très sensible est bon pour exclure une pathologie (SeNex)
  • Un test très spécifique est bon pour inclure une pathologie (SpéPin)

d. Les douleurs chroniques peuvent faire l’objet d’une recherche de centralisation de la douleur.

  • Sensibilisation neurocentrale
    • Mise en évidence d’allodynie et hyperalgésie métamériques ou diffuses
    • Questionnaire de sensibilisation
  • Mémorisation corticale
    • Examen clinique pauvre
    • Douleur inconstante à caractère contextuel
    • Trouble du comportement face à la douleur.

2. RECOMMANDATIONS PAR SYNDROME

a. Syndromes traumatiques

  • Examen visuel
    • Attitude caractéristique du traumatisé du membre supérieur.
    • Impotence fonctionnelle majeure avec limitation des amplitudes articulaires.
    • Déformation osseuse, atteinte tégumentaire
  • Tests de laxité ligamentaire
    • Articulation acromio-claviculaire
  • Tiroir antéro-postérieur
  • Signe de la « touche de piano »
    • Articulation gléno-humérale
  • Test du tiroir
  • Sulcus test
  • Tests d’appréhension
    • Articulation huméro-ulnaire
  • Milking test
  • Test de O’Driscoll
    • Articulations du poignet
  • Tiroir antéro-postérieur radio-carpien
  • Subluxation de la tête ulnaire en prono-supination active
  • Test du tiroir antéro-postérieur radio-ulnaire
  • Test de Watson (scapho-lunaire)
  • Test de Reagan et Linscheid (lunato-triquétrale)
  • Test capito-lunate
  • Test triquetro-hamate
  • Examens complémentaires
    • Radiographies
    • IRM de l’articulation

b. Syndromes inflammatoires

  • Tests cliniques à la recherche d’une inflammation localisée d’un tissu (ténosynovite, bursite, hygroma, …)
    • Tests de mise en évidence d’un conflit sous-acromial
    • Manœuvre de Finkelstein (associée à une extension et abduction contre résistance pour DE Quervain)
    • Crépitations douloureuses à la palpation ou au coulissement des tendons mis sous tension
    • Tuméfaction visible
  • Examens complémentaires :
    • Numération formule sanguine, vitesse de sédimentation, CRP
    • IRM de l’épaule
    • Échographie (coude, poignet)
    • Échographie abdominale
    • ECG, échographie cardiaque
    • EEG, scanner cérébral

c. Syndromes infectieux

  • Numération formule sanguine, vitesse de sédimentation, CRP
  • Ponction de liquide articulaire pour examen de la composition
  • Radiographies

d. Syndromes dégénératifs

  • Examen visuel et palpatoire de l’interligne articulaire
  • Radiographies

e. Syndromes métaboliques

  • Radiographies à la recherche d’une ostéonécrose
  • IRM (ou scintigraphie) en cas de suspicion d’algodystrophie

f. Syndromes tumoraux

  • Vitesse de sédimentation
  • Électrophorèse des protéines sanguines

g. Syndromes dysmorphiques

  • Déformations visibles à l’examen clinique
  • Radiographies

h. Syndromes neurologiques

  • Examen clinique
    • Syndrome du nerf radial profond
      • Mise en tension du muscle par extension du coude, pronation, flexion palmaire et adduction du poignet
      • Reproduction des symptômes en supination contrariée
      • Faiblesse motrice = idem nerf radial
    • Syndrome du nerf médian au pli du coude
      • Compression entre les 2 chefs du rond pronateur et/ou au niveau du sillon bicipital médial.
      • Test de contraction isométrique du rond pronateur ou du biceps brachial peut reproduire la symptomatologie.
      • Recherche d’une faiblesse à la pronation et/ou la flexion du carpe et des doigts.
    • Syndrome du nerf ulnaire dans la gouttière épitrochléo-olécrânienne
      • Tinel sur la gouttière
      • Déclenchement de paresthésies en flexion forcée du coude, avant-bras en pronation
      • Palpation de l’insertion du muscle fléchisseur ulnaire du carpe, préalablement étiré
      • Recherche d’une faiblesse à l’adduction du poignet, à la flexion-extension des deux derniers doigts et aux mouvements de latéralité des doigts++.
      • « Griffe cubitale » et atrophie des interosseux visibles si évolué.

III. Conseils et orientations thérapeutiques possibles

1. DOULEURS

a. Douleur nociceptive locale

  • Médecin
    • Antalgiques dont le pallier dépend de l’intensité
    • Éventuellement AINS per-os (sauf pour tendinopathie)
    • Crème anti-inflammatoire
    • Infiltration locale de corticoïdes (ex : ténosynovite)
    • Immobilisation de l’épaule ou du coude par une écharpe ou une orthèse
    • Immobilisation du poignet par orthèse rigide.
    • Mésothérapie
    • Bloc anesthésique
    • Chirurgie en dernier recours
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie antalgique : électrothérapie, ondes électromagnétiques, ultrasons, thermothérapie.
    • Massage transverse profond et étirements pour les tendinopathies
    • Strapping épaule, coude ou poignet
    • Rééducation gestuelle
  • Autonomie:
    • Repos sportif, limitation du geste délétère
    • Glaçage
    • Auto-massage et étirement

b. Douleur neurogène sur syndrome canalaire

  • Médecin
    • Antalgiques pallier 2/3 et AINS/corticoïdes
    • Dispositif TENS
    • Orthèse sur syndrome du canal carpien
    • Infiltration de corticoïdes
    • Chirurgie canalaire libératrice (canal carpien, loge de Guyon, gouttière épitrochléo-olécrânienne)
    • Neuro-modulation électrique ou chimique
    • Hypnothérapie ericksonienne

c. Douleurs chroniques

  • Médecin
    • Antalgiques
    • En cas de sensibilisation neurocentrale :
    • Antiépileptique, anesthésiques
    • Antidépresseurs, analgésiques
    • En cas de douleurs mémorisées
    • Antidépresseurs, anxiolytiques
    • Éducation thérapeutique
  • Médecin du travail
    • Aménagement de l’environnement professionnel (ergonomie du poste, changement de poste, …)
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie antalgique
    • Rééducation gestuelle
  • Psychothérapeute, sophrologue
    • Hypnothérapie (ericksonienne de préférence)
    • Thérapies psycho-corporelles (yoga, sophrologie, méditation, …)

2. ENRAIDISSEMENT MUSCULAIRE    

a. Réflexe

  • Médecin
    • Myorelaxants
    • Anxiolytiques à dose rhumatologique
    • Toxine botulique type A
    • Mésothérapie
    • Crème décontracturante
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie décontracturante
    • Massothérapie
    • Strapping

b. Intégré

  • Médecin
    • Myorelaxants
    • Anxiolytiques à dose rhumatologique
    • Toxine botulique type A
    •  Mésothérapie
  • Kinésithérapeute
    • Physiothérapie décontracturante

3. REACTION LIQUIDIENNE

  • Médecin
    • AINS ou corticoïdes
    • Infiltration de corticoïdes
    • Ponction articulaire
  • Kinésithérapeute
    •  Drainage
  • Autonomie
    • Protocole RICE ou GREC